Si la cueillette sauvage peut inspirer votre cuisine lors de votre séjour en Ardennes, elle peut aussi donner vie à des cocktails aussi gourmands qu’étonnants.
Un subtil goût de mûre, une vague iodée, un parfum de vanille… Et à la place des emballages en plastique et tapis roulant des caisses, du sureau noir, de la fleur de bourrache et du mélilot : bienvenue dans le supermarché de la nature ! Ici, tout est gratuit, à condition d’ouvrir les yeux et de savoir quelle plante sauvage ramasser. Pas de rayons ou de signalisation, mais des prairies, des bosquets, des forêts où l’on trouve de quoi se mitonner un bon petit dîner, et pourquoi pas, l’apéro qui le précède. En visite en Ardennes, et si on confiait nos verres au meilleur bartender du monde sauvage, Mère nature ?
Pratique séculaire, la cueillette n’a jamais été autant dans l’air du temps. À portée de main, des ingrédients 100% durable, bio, ultra-locaux et de saison, qui ne demandent aucun arrosage artificiel ou espace agricole pour pousser. Pas besoin non plus de machines sophistiquées et coûteuses pour les récoltes, pas d’emballage — si ce n’est un joli feuillage —, pas de gaspillage, aucun transport polluant, et du bon pour pas un rond : c’est fou tout ce que la nature a à nous offrir ! En prime, les plantes rebelles qui poussent en dehors de nos lopins de terre domestiqués sont un merveilleux outil de sensibilisation à l’écologie.
Du Danemark à la Belgique
Pas étonnant que la cueillette sauvage, si naturelle par le passé, se refasse une réputation et un succès. Et preuve que c’est une activité de goût, c’est dans les plus hautes sphères culinaires qu’elle s’est repopularisée. En effet, ces dernières années, de nombreux chefs gastronomiques se sont remis à cultiver le hasard et à aller farfouiller dans les hautes herbes. L’un des acteurs de ce retour à la terre est le fameux chef du « Noma », plusieurs fois nommé meilleur restaurant au monde, René Redzepi. Au Danemark, il est connu pour tirer le meilleur de la vaste nature qui l’entoure. À tel point qu’en 2017, il a lancé « Vild Mad » (« Nourriture sauvage » en français), une application pour apprendre à lire le paysage danois et dévoiler son potentiel culinaire.
Mais il n’y a pas qu’en Scandinavie qu’on peut cueillir de quoi se sustenter. La Belgique, et les Ardennes plus spécifiquement, font l’étalage surprenant de toute une variété de plantes sauvages comestibles. C’est bien simple, 80% d’entre elles se trouvent dans la région, grâce à ses sols acides et ses parcs naturels où les végétaux poussent en toute liberté. À deux pas, ou presque, de votre location. Pas étonnant que l’une des plus impressionnantes communautés de cueilleurs se soit développée en Belgique, et notamment autour de Namur. Elle est à l’origine d’un site-ressource pour le moins fascinant : Cuisine Sauvage. Sur cette plateforme communautaire, on trouve de tout pour remplir nos paniers d’osier de trouvailles sauvages : un index des plantes consommables, des recettes inventives et des ateliers de cuisine, des balades pédagogiques et une indispensable bibliothèque botanique en ligne. La joyeuse équipe propose aussi la visite d’un « jardin des comestibles » à Jambes, avant de se lancer seul ou accompagné dans la cueillette sauvage. En gîte à Yvoir, Dinant, Ciney ou Ohey, pourquoi ne pas y faire un crochet ?
Le point de départ de vos plus belles cueillettes
Après une promenade vivifiante à la recherche des plantes sauvages, concoctez vos cocktails 100% locaux dans l’une de nos maisons.
Une cueillette avertie en vaut deux
Avant de vous lancer, il s’agit tout de même suivre quelques conseils simples, pour éviter de « mauvaises rencontres » dans les fourrés. Après tout, la nature pousse sans étiquette, et il peut être facile pour un novice de confondre géranium sauvage et cigüe. La première mesure, à respecter en toutes circonstances : on ne cueille pas ce qu’on ne connaît pas. Avant de couper dans le paysage, assurez-vous donc de reconnaître précisément la tige, les feuilles, voire les fleurs de la plante que vous vous apprêtez à planter dans votre panier. Second avertissement : attention où vous cueillez. En effet, tous les « spots » ne se valent pas. Pour éviter de s’emparer de plantes contaminées, évitez les voies ferrées, les bords de route, les berges de cours d’eau, les pâturages et toute zone qui a pu être souillée par des animaux. De même, préférez les jeunes pousses aux plantes trop épanouies, qui pourraient avec le temps charrier bactéries et pollution. Enfin, gardez à l’esprit que l’excès nuit en tout.
Apéro sauvage
Si la nature prodigue de quoi bien manger, elle procure aussi de quoi… s’hydrater le gosier ! En effet, le « gin to’ » si cher à votre cœur ne serait rien sans quelques herbes soigneusement sélectionnées. Le fameux gin The Botanist utilise par exemple pas moins de 22 plantes que l’on trouve librement, rien qu’en se baissant. Cette boisson « sauvage » est un alcool de terroir, c’est-à-dire qu’il est produit après distillation d’herbes cueillies dans une zone particulière — ici, la flore de l’île d’Islay, en Écosse. En Belgique, c’est aussi le cas du Maitrank, spécialité de la région d’Arlon, obtenue par macération de vin blanc de Moselle luxembourgeoise et d’aspérule odorante. C’est cette « reine des bois » qui donne tout son cachet au fameux « vin de mai ». En vacances à Martelange ou Virton, ne manquez d’ailleurs pas l’incorrigible fête du Maitrank.
Le temps d’un week-end au vert, vous pouvez également composer vos propres cocktails, avec des sirops ou infusions de plantes sauvages glanées lors de vos promenades. Pour des accords réussis, voici trois recettes pour un apéro bien mérité, après la cueillette. Goûtez à l’ivresse des Ardennes !
Le « sureau glacé »
- Préparez un sorbet aux fleurs de sureau. Pour cela, faites infuser au moins 36 heures le jus d’un citron, des ombrelles de sureau et 100 grammes de sucre. Filtrez l’infusion et placez-la au congélateur. Une fois le mélange glacé, mixez avec un blanc d’œuf jusqu’à l’obtention d’une texture de sorbet.
- Dans une verrine, déposez une boule de sorbet, arrosez de vodka et complétez avec du jus de pamplemousse. Déposez quelques fleurs de sureau en guise de garniture.
Le « frais du jour »
Dans un shaker préalablement placé au congélateur, mélangez :
- 50 ml de gin belge,
- 30 ml de jus de citron fraichement pressé,
- 30 ml de sirop de labiées et pimprenelles. Pour obtenir le sirop, placez dans une cruche les feuilles et couvrez avec un citron coupé en rondelles. Versez dessus un demi-litre d’eau bouillante et laissez macérer pendant au moins 24 heures. Filtrez le jus obtenu, ajoutez le jus d’un citron, 600 grammes de sucre et faites chauffer le tout dans une casserole, jusqu’à l’obtention d’un sirop. Laissez refroidir.
- Versez le tout dans un long drink rempli de glace pilée. Complétez avec de l’eau pétillante ou un soda léger et garnissez du zeste de vos citrons.
Le sabayon arlonais
- Dans une petite casserole à fond épais, versez sur des branches d’aspérule odorante un verre de vin blanc local. Faire chauffer jusqu’à ce que le liquide frémisse.
- Filtrez le liquide et versez-y la même quantité de sucre que de vin. Ajoutez 4 jaunes d’œufs.
- Fouettez la mixture énergiquement sur le feu, jusqu’à l’obtention d’une mousse crémeuse, mais ferme. Le mélange ne doit pas retomber immédiatement. Attention à ne pas faire bouillir.
- Versez dans un grand verre à pied et dégustez immédiatement.
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